Les É.D.I.T.s [Explications du droit par informations et textes] consistent en notules complétant un cours d'Introduction générale au droit en regard de l’actualité canadienne et québécoise. Ce cours [DRT-1901] est offert à distance par l'Université Laval [http://www.ulaval.ca/].

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Le terme ÉDIT, malgré son caractère vieillot, convient à la double nature de nos messages : procéduraux et substantifs, parfois pointus, destinés, de façon pratique, à faire le lien entre le contenu du cours et l’actualité juridique canadienne et québécoise.
Le terme désignait un acte juridique du droit romain (le préteur annonçait l’organisation du procès dans un édit) ou de l’Ancien Régime (acte législatif portant sur une seule matière, ou une seule catégorie de personnes ou une partie seulement du territoire).
Ce choix évite la confusion avec les termes juridiques modernes : loi, décret, arrêt, décision, etc.

vendredi 27 décembre 2013

É.D.I.T./78-2013 Droit d'auteur et plagiat (affaire Robinson)--CSC

Le 27 décembre 2013


1. Extrait du bulletin de nouvelles de Radio-Canada du 23 décembre 2013 : «Claude Robinson obtient gain de cause, mais pas tout son argent.
Au terme d'une saga judiciaire de 18 ans, la Cour suprême du Canada confirme le plagiat de l'œuvre du dessinateur Claude Robinson et rétablit en partie les dommages et intérêts qui lui ont été accordés en première instance.
Dans son jugement, le plus haut tribunal du pays confirme tout d'abord les décisions antérieures de la Cour supérieure du Québec et de la Cour d'appel qui ont statué que la firme Cinar et ses associés ont bel et bien plagié le dessin animé de Claude Robinson, intitulé Les aventures de Robinson Curiosité.


Les maisons de production maintenaient pour leur part qu'elles n'ont pas plagié l'oeuvre de Claude Robinson et que les tribunaux inférieurs n'auraient jamais dû se baser sur des témoignages d'experts dans cette affaire pour déterminer s'il y avait eu oui ou non plagiat. Cinar et ses associés contestaient en fait la façon dont les tribunaux s'y sont pris pour déterminer ce qui constituait un plagiat dans cette affaire.
Outre Cinar et leurs propriétaires, Ronald Weinberg et feu Micheline Charest, plusieurs firmes étaient impliquées dans cette poursuite, dont France Animation, Ravensburger Film, RTV Family Entertainment, Izard France Animation, Davin et France Animation S.A.


Plus de 4 millions de dollars de dommages et intérêts
En ce qui a trait aux dommages et intérêts dans cette affaire, la Cour suprême du Canada accorde à Claude Robinson environ 4,4 millions de dollars qui se déclinent comme suit :
400 000 $ de dommages moraux;600 000 $ de droits d'auteurs;500 000
de dommages punitifs;1,4 million de dollars pour les profits de la trame sonore de Robinson Curiosité;1,5 million de dollars de frais extrajudiciaires;
S'ajoutent à tout cela les dépenses (frais de photocopies, documents, recherche, etc.) qui pourraient s'élever à plusieurs dizaines de milliers de dollars.
Précisions cependant que les frais judiciaires encourus par Claude Robinson en Cour d'appel et en Cour suprême ne lui seront pas remboursés.


Claude Robinson n'est pas au bout de ses peines
Malgré cette victoire devant la Cour suprême, Claude Robinson devra travailler encore pour récupérer les sommes qui lui sont accordées par la justice. En effet, le plus haut tribunal du pays ne condamne pas solidairement les coupables dans cette affaire pour les 500 000 $ de dommages punitifs et les 1,4 million de profits sur la trame sonore.


Cela signifie qu'en cas de faillite ou d'insolvabilité des firmes condamnées à payer des dommages, leurs associés ne pourront être obligés de payer M. Robinson à leur place. Ce qui signifie aussi que c'est Claude Robinson lui-même qui devra s'occuper de percevoir ces importantes sommes auprès de ses adversaires.
De plus, plusieurs des firmes partenaires de Cinar visées par ce jugement sont basées en Europe, ce qui complique davantage les choses pour Claude Robinson.
Rappelons que M. Robinson n'a pas encore touché un sou dans cette affaire. À la suite du jugement de la Cour d'appel, en juillet 2011, les sommes qui devaient lui être versées ont été déposées dans un compte en fidéicommis, en attendant le jugement de la Cour suprême.
La cause de Claude Robinson a été grandement médiatisée au Québec. Un mouvement de soutien populaire à son égard avait d'ailleurs permis d'amasser des fonds pour lui venir en aide.


18 années et trois tribunaux plus tard
Cette saga judiciaire entre l'auteur dessinateur Claude Robinson et Cinar a commencé en 1996, lorsque Claude Robinson a accusé Micheline Charest et Ronald Weinberg, avec qui il avait travaillé par le passé, d'avoir plagié son dessin animé Robinson Curiosité.
Selon Claude Robinson, les propriétaires de Cinar avaient repris l'ensemble de son concept dans une série de dessins animés similaires intitulée Robinson Sucroé.
Il s'en est suivi une longue série de poursuites et de démêlés judiciaires devant les tribunaux pour la reconnaissance des droits d'auteurs de Claude Robinson qui a consacré plus de 18 ans de sa vie pour obtenir justice dans cette affaire.
En août 2009, Claude Robinson avait obtenu 5,2 millions de dollars de dédommagement en Cour supérieure du Québec qui reconnaissait par ailleurs que Cinar et ses partenaires avaient bel et bien plagié l'oeuvre de Claude Robinson. La cause avait été aussitôt portée en appel par Cinar et ses partenaires.
Deux ans plus tard, la Cour d'appel avait elle aussi confirmé le plagiat, mais avait réduit à 2,7 millions de dollars le montant accordé à Claude Robinson.
L'auteur avait alors déclaré que cette somme ne lui permettrait même pas de couvrir ses frais juridiques alors que les maisons de production avaient selon lui abusé de leur pouvoir, puisque leurs frais juridiques sont payés par leurs assurances, alors que lui doit assumer seul les sienLors de telles poursuites, la loi canadienne ne permet pas aux particuliers de déduire leurs frais judiciaires de leurs impôts tandis que les entreprises, elles, ont le droit de le faire, ce qui ramène à l'avant-scène la question de l'accès à la justice pour les citoyens au pays. »



2. Précisions juridiques (référence contexte etc)
Il s’agit de la décision Cinar Corporation c. Robinson, 2013 CSC 73, rendue le 23 décembre 2013.


3. Commentaires, questions
Cette saga judiciaire va passer à l’histoire autant pour son interprétation
libérale du droit d’auteur que pour illustrer la difficulté pour un justiciable solitaire de vaincre les «Goliath» de l’entreprise.
L’immense combat pour la justice demeure entier; si on veut que le système garde son utilité il faudra que les modalités de réalisation/exécution du jugement soient prises en compte dès le début.
En d’autres termes l’avenir de la procédure civile tient peut-être dans des mesures conservatoires efficaces, immédiates et prédominantes sur les échappatoires dont disposent les récalcitrants résumées dans les trois F
(faillite, fiscalité, fraude) et que trois nouveaux F les remplacent : Facilité,
Finalité, Finesse.



 4. Lien avec les modules du cours
La propriété intellectuelle est globalement présentée au Module 4 et étudiée dans ses déclinaisons dans d'autres modules.
Le doit d'auteur en particulier est abordé au Module 10.
L’É.D.I.T./32-2009 Droit d'auteur et plagiat (affaire Robinson) porte sur la décision de 1ère instance : Robinson c. Films Cinar inc., 2009 QCCS 3793 (CanLII)

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Québec, (Québec), Canada
Avocat au Barreau de Québec, Chargé de cours à la Faculté de droit de l'Université Laval