Les É.D.I.T.s [Explications du droit par informations et textes] consistent en notules complétant un cours d'Introduction générale au droit en regard de l’actualité canadienne et québécoise. Ce cours [DRT-1901] est offert à distance par l'Université Laval [http://www.ulaval.ca/].

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Le terme ÉDIT, malgré son caractère vieillot, convient à la double nature de nos messages : procéduraux et substantifs, parfois pointus, destinés, de façon pratique, à faire le lien entre le contenu du cours et l’actualité juridique canadienne et québécoise.
Le terme désignait un acte juridique du droit romain (le préteur annonçait l’organisation du procès dans un édit) ou de l’Ancien Régime (acte législatif portant sur une seule matière, ou une seule catégorie de personnes ou une partie seulement du territoire).
Ce choix évite la confusion avec les termes juridiques modernes : loi, décret, arrêt, décision, etc.

dimanche 4 novembre 2012

É.D.I.T./66-2012 Alcool au volant--Fardeau de la preuve--Allègement

1. Extrait du bulletin de Radio-Canada du 2 novembre 2012 :

«Alcool au volant : la Cour suprême réduit le fardeau de la preuve

La Cour suprême du Canada invalide certains amendements de la loi sur l'alcool au volant qui alourdissaient le fardeau de la preuve des gens voulant démontrer que leur taux d'alcoolémie ne dépassait pas la limite permise au moment de leur arrestation.
Les juges sont parvenus à cette conclusion dans un jugement divisé à 5 contre 2.
La Cour suprême statue qu'il suffit au défendeur de démontrer que l'éthylomètre était défectueux ou que le technicien a commis une erreur dans son utilisation pour semer un doute dans l'esprit du juge.
La loi, telle que rédigée par les conservateurs en 2008, stipulait que le défendeur devait réunir trois conditions soit : prouver la défectuosité de l'éthylomètre ou une utilisation erronée, démonter que la défectuosité avait eu un impact sur son résultat à l'éthylomètre en plus de prouver que son taux d'alcoolémie ne dépassait pas la limite permise.
Cet article, dans son ensemble, a été jugé inconstitutionnel par la Cour suprême. Les juges ont décidé de conserver uniquement la première condition, qui est de démontrer une défectuosité de l'appareil ou une erreur de manipulation.
Des avocats soutenaient que cette modification au Code criminel violait la Charte canadienne des droits et libertés parce qu'elle renversait le fardeau de la preuve. Ils ont plaidé que la loi faisait en sorte que les défendeurs étaient présumés coupables et qu'ils devaient faire la preuve de leur innocence. Une disposition qui contreviendrait à la Charte dans laquelle il est stipulé que tout accusé est présumé innocent jusqu'à ce que la Cour prouve sa culpabilité.
La Cour suprême maintient toutefois l'exclusion de la défense « des deux bières ». Cette défense consistait à tenter de convaincre le juge que l'éthylomètre des policiers était défectueux en rendant compte dans le détail, témoins à l'appui, de sa consommation d'alcool. Un toxicologue devait ensuite venir attester que, selon la consommation d'alcool alléguée par l'accusé et ses témoins, le taux d'alcoolémie du défendeur ne pouvait atteindre celui indiqué par l'éthylomètre.
Les juges de la Cour suprême ont par ailleurs invalidé l'article de la loi qui rendait les nouvelles dispositions rétroactives. Les personnes arrêtées avant le 2 juillet 2008 ne sont donc pas assujetties aux dispositions de la loi introduites à cette date.
La décision n'aura aucun effet le cas de la femme à l'origine de la contestation. Interceptée à Sherbrooke le 30 décembre 2008 dans un barrage routier, Anic St-Onge-Lamoureux a été reconnue coupable de conduite avec les facultés affaiblies et elle n'a pas porté sa cause en appel.


2. Précisions juridiques (référence contexte etc)
Il s'agit de la décision R. c. St‑Onge Lamoureux, 2012 CSC 57 (CanLII), rendue le 2 novembre 2012.


3. Commentaires, questions
Les §§ 2-11 de la décision livrent l’historique de la question de la lutte contre l’alcool au volant.
Encore une fois, c’est à l’aune de la Charte que la disposition sera invalidée :
[31]                          La justification d’une présomption légale au regard de l’article premier dépend de plusieurs facteurs, notamment des suivants : l’importance de l’objectif législatif, la difficulté pour la poursuite de prouver hors de tout doute raisonnable le fait substitué, la possibilité pour la personne accusée de repousser la présomption et la facilité avec laquelle elle peut le faire et, comme le révèle le présent cas, les progrès scientifiques.

[32]                          La grille d’analyse à suivre pour décider si une disposition législative portant atteinte à un droit garanti par la Charte est par ailleurs justifiée au regard de l’article premier est bien connue. Elle a été établie dans Oakes.


4. Lien avec les modules du cours
La question de l’alcool au volant déclinée dans les divers aspects du droit (substantif, procédural et de la preuve,--cf. Module 5) est abordée dans les Modules 19 à 21, relatifs au droit criminel.  

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Québec, (Québec), Canada
Avocat au Barreau de Québec, Chargé de cours à la Faculté de droit de l'Université Laval