Les É.D.I.T.s [Explications du droit par informations et textes] consistent en notules complétant un cours d'Introduction générale au droit en regard de l’actualité canadienne et québécoise. Ce cours [DRT-1901] est offert à distance par l'Université Laval [http://www.ulaval.ca/].

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Le terme ÉDIT, malgré son caractère vieillot, convient à la double nature de nos messages : procéduraux et substantifs, parfois pointus, destinés, de façon pratique, à faire le lien entre le contenu du cours et l’actualité juridique canadienne et québécoise.
Le terme désignait un acte juridique du droit romain (le préteur annonçait l’organisation du procès dans un édit) ou de l’Ancien Régime (acte législatif portant sur une seule matière, ou une seule catégorie de personnes ou une partie seulement du territoire).
Ce choix évite la confusion avec les termes juridiques modernes : loi, décret, arrêt, décision, etc.

mercredi 22 septembre 2010

É.D.I.T./42-2010 Ébriété--Éthylomètre--Présomption de validité--Inconstitutionnalité


Le 22 septembre 2010

1. Extrait du bulletin de nouvelles de Radio-Canada du 18 septembre 2010:
«Les conducteurs qui se font arrêter en état d'ébriété pourraient à nouveau contester la validité des résultats des éthylomètres.
Dans un jugement rendu jeudi au palais de justice de l'arrondissement de Chicoutimi, le juge Pierre Lortie a déclaré inconstitutionnelle la disposition du Code criminel qui introduisait l'équivalent d'une présomption du bon fonctionnement des appareils. Le gouvernement fédéral avait modifié la loi le 2 juillet 2008.
Les avocats de la défense alléguaient que la disposition minerait la présomption d'innocence garantie par la Charte canadienne des droits et libertés.
Au Québec, cinq cas types sélectionnés par l'Association québécoise des avocates et avocats de défense ont été amenés devant les tribunaux dans les districts judiciaires de Chicoutimi et de Sherbrooke. Les juges Pierre Lortie et Conrad Chapdelaine devaient se prononcer sur la question.
L'avocat Jean-Marc Fradette a plaidé la cause devant le juge Lortie. Il affirme que la disposition imposait à l'accusé de prouver le mauvais fonctionnement ou la mauvaise manipulation de l'alcootest. Il est peu surpris de la décision du juge Lortie.
L'avocat Charles Cantin se réjouit lui aussi du jugement. « On a toujours accepté le fait qu'un alcootest puisse donner certains résultats. Maintenant, avant les amendements, nous avions le loisir de contester et d'amener ce qu'on appelle une preuve contraire. Le jugement a été rendu aujourd'hui, nous regarderons ce qui sera fait, et quant à nous, ça nous ramène dans les bonnes vieilles années », souligne Me Cantin.
La décision du juge Lortie risque d'être contestée en Cour d'appel. L'avocat Jean-Marc Fradette rappelle cependant que d'ici à ce qu'un appel du jugement soit entendu, les autres juges pourront acquitter des accusés à partir de la décision du juge Pierre Lortie.»

2. Précisions juridiques
Il s'agit de la décision
R. c. Laforge, 2010 QCCQ 7718 (CanLII),
[http://www.canlii.org/fr/qc/qccq/doc/2010/2010qccq7718/2010qccq7718.html], rendue le 16 septembre 2010.
La décision comporte 333 paragraphes.

3. Commentaires, questions

Cette décision illustre bien la complexité du droit pénal, dans ses aspects substantifs et de preuve.
Avec ses 352 notes,la jurisprudence citée, les reproductions de pièces en annexe et les longues bibliographies produites par les parties, elle constitue un cours de droit complet sur l’ivressomètre.
Pressantant l’importance de l’affaire et la perspective d’un appel, le juge Lortie nous offre le luxe--rare en jurisprudence--d’une table des matières du jugement, permettant au lecteur de consulter, surtout sur les points de droit, la partie qui l’intéresse. Nous éditons ici certaines entrées, délestées du factuel.
Table des matières [partielle]
COMPÉTENCE CONSTITUTIONNELLE D’UNE COUR PROVINCIALE
LE CHEMINEMENT PROCÉDURAL
ALCOOL AU VOLANT : LES RÈGLES DE BASE
LA CHARTE ET LA PRÉSOMPTION D’INNOCENCE §§ 88 et ss.
RESTRICTION ET JUSTIFICATION §92 et ss.
LA RÉPARATION § 102 et ss.
LE RÉGIME GÉNÉRAL DES PRÉSOMPTIONS § 105 et ss
ALCOOL AU VOLANT : LE DROIT AVANT LE 2 JUILLET 2008
LES PROJETS DE LOI
ALCOOL AU VOLANT : LE DROIT À COMPTER DU 2 JUILLET 2008
DIVULGATION DE LA PREUVE
ANALYSE ET DÉCISION


La Conclusion se lit partiellement comme suit:
[327] PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

VOLET CONSTITUTIONNEL

[328] DÉCLARE que les nouvelles dispositions des sous-paragraphes c, d.01 et d.1 de l'article 258(1) C.cr., découlant de la Loi modifiant le Code criminel et d’autres lois en conséquence[345], ou, selon le titre abrégé, Loi sur la lutte contre les crimes violents, portent atteinte à la présomption d’innocence protégée par la Charte canadienne des droits et libertés.
[329] DÉCLARE que cette contravention ne constitue pas une limite raisonnable au sens de l'article premier de la Charte canadienne des droits et libertés.
[330] DÉCLARE par conséquent que les nouvelles dispositions sont inopérantes.

4. Lien avec les modules du cours

Le droit pénal est présenté comme une division majeure du droit au module 5 et fait l’objet des modules 19 à 21 [les modules 20 et 21 sont en rédaction finale et seront disponibles durant le trimestre d’automne 2010].
La Charte des droits fait l’objet d’une brève présentation au module 4.
La notion du fardeau de la preuve est présentée au module 5.




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Québec, (Québec), Canada
Avocat au Barreau de Québec, Chargé de cours à la Faculté de droit de l'Université Laval